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Les règles de l’Union européenne stipulent qu’il est illégal pour les pays de l’UE d’offrir une aide financière à certaines entreprises mais pas à d’autres d’une manière qui pourrait fausser la concurrence.

On appelle ce type d’aide des aides d’État. Les règles qui l’interdisent sont appliquées par la Commission européenne et les juridictions nationales.

Les aides d’État sont régies par le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFEU). Ses règles stipulent que la Commission européenne doit préalablement autoriser toute aide d’État, et que les pays ne doivent accorder aucune aide non autorisée par la Commission. Si une aide est accordée sans autorisation, celle-ci sera presque toujours automatiquement considérée comme illégale et l’entreprise qui l’aura perçue pourra être condamnée à la rembourser.

Il existe deux exceptions à cette règle : lorsque la somme en question est modeste et lorsqu’elle est couverte par le règlement général d’exemption par catégorie.

Qu’est-ce qu’une aide d’État ?

Selon le TFEU, il s’agit d’une « aide octroyée par un État membre ou par des ressources d’État sous quelque forme que ce soit qui fausse ou menace de fausser la concurrence en favorisant certaines activités ou la production de certaines marchandises qui, dans la mesure où elle affecte les échanges entre les États membres, est incompatible avec le marché intérieur ».

Un test en quatre étapes a été développé pour identifier si une action constitue ou pas une aide d’État. Ce test étant cumulatif, l’aide d’État ne sera avérée que si les quatre parties ont été satisfaites. Pour identifier la présence d’une aide d’État tous les éléments suivants doivent être satisfaits :

  • l’aide est octroyée par l’État ou par des ressources d’État
  • à une entreprise spécifique
  • créant ainsi un avantage sélectif
  • le transfert de ressources fausse ou peut potentiellement fausser la concurrence et les échanges entre les pays de l’UE.

Les aides d’État comprennent les éléments suivants :

  • des allocations ou des subventions publiques directes, telles qu’une aide dite de sauvetage ;
  • des exonérations fiscales ou d’autres exemptions en matière de sécurité sociale ;
  • des prêts à des taux d’intérêt préférentiels ;
  • des garanties ou des indemnités à des conditions favorables ;
  • des subventions ou des prêts préférentiels ;
  • la cession de terrains ou de bâtiments pour un montant inférieur à leur pleine valeur marchande ;
  • la radiations de dettes ;
  • la renonciation à des profits ou à d’autres rendements sur des fonds publics ;
  • l’aide à l’exportation ;
  • des « faveurs » pour attirer des investissements dans une région ;
  • l'« abandon » de passifs (concernant par exemple les paiements de sécurité sociale des employeurs ou les droits de licence).

Le test en quatre parties

Première partie : Les « ressources d’État »

Les « ressources d’État » comprennent les administrations centrales et locales, ainsi que les organismes publics ou privés qui utilisent des ressources d’État ou qui sont contrôlés par l’État. Un « transfert de ressources » peut être positif, sous la forme d’une subvention par exemple, ou négatif, sous la forme d’un rabais fiscal ou d’un prêt à des taux d’intérêt inférieurs à ceux du marché. Lorsque le transfert améliore la situation financière nette du bénéficiaire ou l’empêche de se détériorer, il est alors susceptible de constituer un transfert de ressources d’État.

Deuxième partie : « une entreprise »

La question de savoir si le bénéficiaire de l’aide d’État est une « entreprise » au sens des règles doit ensuite être évaluée. Une entreprise est une entité de quelque forme juridique que ce soit qui exerce une activité économique. Cette définition s’applique également aux sociétés publiques, aux sociétés à but non lucratif et aux œuvres caritatives bénéficiaires d’une aide d’État à partir du moment où ces dernières exercent une activité économique qui entre en concurrence avec d’autres opérateurs.

Troisième partie : un « avantage sélectif »

Pour déterminer si l’une ou l’autre des parties retirera un « avantage », il faut se demander si l’entreprise concernée reçoit un avantage économique qu’elle n’aurait pas pu obtenir dans des conditions de marché normales.

Quatrième partie : « capacité à fausser la concurrence »

L’aspect le plus important de cette dernière partie du test consiste à savoir si l’avantage sélectif octroyé à l’entreprise peut fausser la concurrence. Il n’est pas nécessaire que le biais en question soit prouvé. En règle générale, cette partie du test est facile à satisfaire et, bien souvent, l’avantage sélectif s’avérera susceptible de fausser la concurrence.

Le test de principe de l’investisseur en économie de marché

La troisième partie du test utilise le principe de l’investisseur en économie de marché pour déterminer si l’aide a octroyé au bénéficiaire un avantage économique. Ce principe pose la question suivante : dans des circonstances comparables, un investisseur privé aurait-il fourni ces sommes ou ce soutien au bénéficiaire s’il opérait dans des conditions d’économie de marché normales ?

L’avantage peut prendre diverses formes et inclure des prêts, des garanties et des injections de capitaux. Quelle que soit sa forme, l’organisme public qui l’a octroyé doit se comporter de la même manière qu’un investisseur privé dans des circonstances similaires.

Les investisseurs privés ne procurent aucun avantage à une quelconque entité sans exiger de compensation en retour. Un investisseur privé dans des conditions de marché normales est uniquement motivé par la possibilité de réaliser un profit ou un retour sur investissement, et tous les autres objectifs, de quelque valeur que ce soit, comme la réduction du chômage ou l’accroissement des investissements régionaux, sont ignorés par l’investisseur privé.

Les évaluations du test de principe de l’investisseur en économie de marché ne doivent pas être effectuées rétrospectivement. L’analyse doit s’appliquer aux faits disponibles au moment où l’organisme public pertinent prend la décision d’investir. La mesure financière ou l’investissement ne doit pas être évalué avec du recul et le fait que l’investissement s’avère rentable par la suite n’est pas pertinent s’il n’y a pas d’avantage réaliste dès le départ pour l’organisme public.

Autres instruments d’analyse de la conformité des aides d’État

Il existe deux exceptions à l’application des règles relatives aux aides d’État.

Règlement général d’exemption par catégorie (RGEC)

Certains types d’aides sont dispensés en vertu du RGEC. Cette dispense dépend du type de projet, de la forme de l’aide et de toute condition relative à l’octroi de l’aide.

Un nouveau RGEC publié en mai 2014 est entré en vigueur le 1er juillet 2014. Celui-ci élargit considérablement la portée de l’aide pré-approuvée et inclut plusieurs nouvelles catégories d’aides.

Les pays ne sont pas tenus de notifier la Commission en vue d’obtenir son approbation si leurs mesures d’aide d’État répondent aux dispositions du RGEC.

Règlement de minimis

En vertu du règlement de minimis, une aide peut être octroyée à condition qu’elle n’excède pas 200 000 euros sur une période de trois exercices fiscaux.

Notification

Si aucune exemption ne s’applique et que le test en quatre parties conclut que l’activité concernée correspond bel et bien à une aide d’État, la Commission doit être informée de la proposition. L’article 108, paragraphe 3, du TFUE stipule que cette notification doit être suffisamment longue pour permettre à la Commission de présenter ses observations. Si cette dernière estime que la proposition n’est pas compatible avec le marché intérieur, elle prendra des mesures et le pays ne devra pas mettre en œuvre les mesures qu’il propose tant qu’une décision finale n’aura pas été prise.

Les règles indiquent expressément qu’aucune mesure relative à l’aide ne doit être mise en œuvre préalablement à cette notification et à l’obtention d’une réponse positive de part de la Commission. C’est ce que l’on appelle l’obligation de suspension.

Violations de l’obligation de suspension

Les pouvoirs dont dispose la Commission sont limités lorsqu’un État décide de poursuivre et de mettre en œuvre les mesures proposées. Elle doit procéder à une évaluation complète et souvent longue de la compatibilité de l’aide avec le marché intérieur avant de pouvoir ordonner le remboursement de cette aide, indépendamment du fait que l’obligation de suspension ait été violée ou non.

La Commission peut ordonner le remboursement de l’aide à titre provisoire dans l’attente d’une décision finale, mais uniquement dans des circonstances exceptionnelles, comme lorsqu’il n’existe aucun doute quant à la nature de la mesure en matière d’aide d’état, qu’il est urgent d’agir et qu’il existe un risque grave de dommages substantiels et irréparables pour un concurrent.

Il existe également une autre approche. L’obligation de suspension a un « effet direct », ce qui signifie que les juridictions nationales peuvent prendre toutes les mesures nécessaires pour remédier à la violation de l’obligation de suspension en ordonnant notamment le remboursement intégral de tout paiement effectué. Contrairement à la Commission, les juridictions nationales peuvent ordonner le remboursement des aides illégales, que celles-ci soient compatibles avec le marché intérieur ou pas, dans la mesure où l’appréciation de la compatibilité d’une mesure relève de la responsabilité exclusive de la Commission. Cela garantit un processus de remboursement de l’aide plus rapide que par le biais de la Commission.

Contestations

Plainte à la Commission

Quiconque peut déposer une plainte auprès de la Commission à condition de démontrer un intérêt particulier dans l’aide octroyée. Les plaintes sont généralement soulevées par les concurrents des bénéficiaires de l’aide.

Le processus de la Commission est très souple, et peut varier d’un cas à l’autre.

Les principales étapes de dépôt d’une plainte relative au Royaume-Uni sont les suivantes :

  • une fois la plainte déposée, la Commission sera susceptible de notifier les autorités britanniques ;
  • le département des Entreprises, de l’Innovation et des Compétences de l’unité des aides d’État travaillera avec l’autorité compétente du Royaume-Uni pour résoudre le problème et guider l’autorité britannique ;
  • la Commission pourra demander certaines informations aux autorités britanniques et fixer un délai spécifique pour obtenir leur réponse ;
  • la Commission décidera si la plainte est légitime. Si elle ne l’est pas, elle pourra refuser de poursuivre l’examen de l’affaire ;
  • la Commission pourra également décider de poursuivre l’affaire. Dans une telle éventualité, elle pourra demander des informations supplémentaires ou décider d’ouvrir une enquête formelle. Dans ce dernier cas, elle pourrait imposer une injonction au Royaume-Uni afin d’empêcher de nouveaux paiements de l’aide. Dans des circonstances extrêmes, comme en cas d’urgence et de risque de préjudice irréparable grave pour un concurrent, la Commission pourra exiger le remboursement temporaire de certaines aides.

Un délai de prescription de 10 ans est applicable pour le remboursement des aides illégales. Ce délai commence à la date où l’aide est octroyée au bénéficiaire, mais peut être interrompu par différents événements et se prolonger sur une période supérieure à 10 ans.

Contestation judiciaire devant une juridiction nationale

Les contestations judiciaires contre les aides d’État illégales sont relativement rares au Royaume-Uni. Le dépôt d’une plainte auprès de la Commission européenne est généralement la méthode de contestation préférée. Or, ces plaintes, bien que possibles, prennent généralement beaucoup de temps à résoudre, ce qui explique peut-être pourquoi le nombre de contestations d’aides d’État portées devant les tribunaux a augmenté au cours des dernières années au Royaume-Uni.

La contestation judiciaire d’une aide d’État au Royaume-Uni s’effectue au moyen d’une action de contrôle juridictionnel, soulevée devant la Haute Cour de justice. La contestation se fonde généralement sur une allégation selon laquelle la décision d’octroi de l’aide serait illégale ou « ultra vires », ce qui signifie que les actes en question ne relèvent pas du ressort de l’état. À moins d’être expressément approuvée, l’aide d’État est jugée illégale.

Dans le passé, les auteurs des contestations réclamaient des indemnités pour la perte subie suite à l’octroi de l’aide, généralement à l’un de leurs concurrents. Ils sollicitaient également des injonctions contre l’autorité ayant émis l’aide afin d’empêcher que cette dernière n’octroie ou continue à octroyer l’aide en question. Cette injonction était une ordonnance provisoire, dans l’attente de l’issue de l’action judiciaire, ou une plainte à la Commission.

Une décision récente de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a toutefois modifié le paysage dans lequel sont soulevées les actions des tribunaux nationaux en matière d’aides d’État. Suite au jugement de l’affaire impliquant la compagnie aérienne Lufthansa et l’aéroport de Francfort-Hahn, les juridictions nationales ont désormais la possibilité d’ordonner le remboursement de toute aide d’État présumée illégale avant que la Commission ne parvienne à une conclusion finale dans le cadre d’une enquête.

Si la façon dont ce jugement européen sera mis en œuvre ou suivi dans chaque pays de l’UE reste encore à voir, il est toutefois possible qu’il ne soit ordonné qu’en tant que mesure provisoire, à l’instar d’une injonction provisoire, et donner lieu à une ordonnance de retour. La différence étant, cependant, qu’au lieu d’être ordonné de cesser de faire quelque chose, le bénéficiaire de l’aide serait ordonné de rembourser activement l’aide.

Ceci pourrait permettre aux contestataires vexatoires d’intervenir dans les mesures d’aide octroyées à leurs concurrents et d’obtenir une ordonnance de retour, sans l’examen minutieux de la Commission, ce qui aurait un effet très préjudiciable sur le bien-être financier du bénéficiaire de l’aide.

Un délai de prescription de trois mois est applicable pour toute action de révision judiciaire.

Conséquences d’une aide d’État illégale

Seule la Commission, sous réserve de la surveillance de la CJUE, est habilitée à déterminer si une aide d’État illégale est compatible ou pas avec le marché intérieur. La Commission peut imposer une condition selon laquelle l’État doit récupérer l’aide en question, avec intérêts à compter de la date de la subvention. Cela pourrait entraîner de graves conséquences financières pour le bénéficiaire de l’aide d’État illégale dans la mesure où le remboursement de l’aide pourrait réduire sensiblement ses flux de trésorerie ou ses fonds. La réputation de l’autorité ayant octroyé l’aide d’État illégale serait également affectée de manière négative.

Sous réserve de la compétence exclusive de la Commission quant à la compatibilité de l’aide avec le marché intérieur, la juridiction nationale peut déterminer les questions de responsabilité découlant de l’octroi d’une aide illégale. Celle-ci a également le pouvoir d’ordonner le remboursement d’une aide d’État prétendument illégale en attendant la décision finale de la Commission européenne sur sa compatibilité, d’octroyer une mesure injonctive, d’accorder des dommages-intérêts ou d’adopter toute autre mesure nécessaire pour remédier à l’illégalité de l’aide.

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